Sens du sacré, même si...
... les religions n'ont rien apporté de grand à l'humanité,
les philosophies peut-être,
l'art sûrement...
(DOURVAC'H)
Edward BURNE-JONES, "The Beguiling of Merlin" ("La séduction de Merlin", 1874 - détail)
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signature de Julien GRACQ, auteur de
"Le Rivage des Syrtes" (1951) et "Un balcon en forêt" (1958)
Enfances / Pays natal / Printemps
L'enfance - puis ce jour où l'on se dit : " Tiens, c'est déjà fini ? "
L'enfance que l'on retrouve, bien longtemps après, dans les livres de Schulz et Dhôtel...
Merveilleux Pays natal de Dhôtel, ses agiletés d'écriture et habiletés de conteur oriental ...
" Un soir d'été, s'étant allongé sur l'herbe du carrelage, les yeux au ciel, il avait vu deux hirondelles passer très haut comme des flèches, et les avait entendues crier très haut. Alors il s'ingénia à imiter les cris, (...)
Parfois certaines d'entre elles vinrent se poser et gazouiller sur des fils électriques à trente pas de là, à mi-chemin du ciel. En vérité les hirondelles étaient ailleurs, et il souhaitait qu'elles demeurent ainsi dans ce monde supérieur. "
André DHOTEL, Pays natal, 1966, ré-éd. 2003, éditions Phébus, chapitre I, page 29
Puis... ces XXXIX chapitres célestes du Printemps, laissés en 1937 par le peintre-graveur Bruno Schulz, court roman d'émerveillements de pages en pages...
" En ces nuits d'avant le printemps, vastes et sauvages, recouvertes d'un ciel immense, encore sévères et inodorantes, conduisant à travers les accidents du firmament vers les déserts étoilés, mon père m'emmenait dîner dans le jardin d'un petit restaurant (...)
Nous marchions dans la lumière humide des réverbères qui clinquaient sous les coups du vent, à travers la grande place voûtée, seuls, écrasés par l'immensité des labyrinthes célestes (...) ; Père levait vers le ciel son visage inondé d'une faible clarté et regardait avec un chagrin amer le gravier des étoiles disséminées, les tourbillons répandus (...) "
Le Printemps - in Le sanatorium au croque-mort (1937),
éd. Denoël, pages 42-43, traduction de Thérèse Douchy
Emilie Etienne / "La Belle et la Bête"
Quand vous découvrez ce tableau d'Emilie Etienne, non seulement vous n'en croyez pas vos yeux morts mais vous êtes déjà égaré(e) dans les vieux rêves du monde - là où les colonnes de marbre s'enfoncent dans un ciel dallé de brume, là où une femme splendide s'avance en robe écarlate (telle l'Amélie sauvage et sylvestre du "Mont Damion", roman d'André Dhôtel).
Le visage de la Bête, au premier plan, semble assoupi - plongé dans son sommeil léger de félin...
Les sangs de "La Belle et la Bête" (illustrés par Jean Cocteau au cinéma) n'ont dû faire qu'un tour ! Le maquillage pileux, les fumées savantes et les superbes éclairages de la pellicule noir-et-blanc auraient donc trouvé ici leur maître(-sse) ? Probable...
Voici un chef d'oeuvre...
Et à contempler trop longtemps cette oeuvre, une vieille blague de lycéen des vieux siècles remonte à la surface : "Les bras vous en tombent, comme à la Vénus de Milo " !
Allons donc rendre visite aux "Dark Fairies" d'Emilie (http://www.darkfairies.com/), y retrouver quelques illustrations de son superbe ouvrage de 2004 - qu'il nous reste à nous procurer (AK éditions, Brest) ...
Personnellement fier d'avoir eu l'occasion de vous rencontrer par vos oeuvres, Emilie Etienne et Amandine Labarre, car vous êtes nos Pré-Raphaëlites d'aujourd'hui et demain...
(voir encore notre article "Clair obscur" sur l'oeuvre d'Amandine Labarre, ci-dessous)
Amandine Labarre / " Clair obscur "
CLAIR OBSCUR
C'est un Vallon (secret) des Merveilles à visiter d'urgence : le site http://amandine.labarre.free.fr/ "Clair obscur" d'Amandine Labarre, graphiste et peintre virtuose "free lance" de 26 ans !
Si les fées existent, Amandine est vraiment l'une d'elles !
Son inspiration romantique, la magie douce des coloris de sa baguette-pinceau - la beauté de ses figures mystérieuses (dignes de Caspar-David Friedrich et Edward Burne-Jones) : tout y est extraordinaire ! ...
Ses figures-reflets (ci-dessus) évoquent pour moi la belle "Nadja" d'André BRETON...
Commentaires
je suis allée faire un petite promenade sur ce site et il est vraiment magnifique...
Carrefour des rêves
Muriel, merci de cette nouvelle visite.
Sûrement un jour Amandine aura-t-elle cette liberté économique de délaisser un moment les figures imposées de la Fantasy (lutins-et-fées-aux-oreilles-pointues) pour peindre comme ici - superbement - ses rêves ?
As-tu vu encore son superbe tableau-évocation d'une des "Illuminations" d'Arthur Rimbauld ?
Bruno Schulz : autoportrait
Boutiques de cannelle
Un autoportrait de Bruno Schulz (1893-1942)
J'aime ce halo de mystère et le labyrinthe de ces maisons miniatures autour du peintre-dessinateur-graveur-poète Bruno SCHULZ (professeur de dessin dans le civil).
L'artiste s'est campé au milieu de sa ville natale de Drohobycz (ex-Galicie autrichienne, aujourd'hui en Ukraine).
Autour de lui - au pied de chaque maison de poupée - tous les rêves, les fascinations et odeurs des ruelles de son enfance semblent reprendre vie...
Sklepy Cynamonowe : boutiques de cannelle...
FRAU AM FENSTER (Femme à la fenêtre) / Caspar David FRIEDRICH
Caspar David Friedrich : LA GRANDE RESERVE
"La grande réserve" ("Das grosse Gehege"), peint en 1832 et toujours si crépusculaire... trois ans avant son tableau-somme, "Les âges de la vie"...
Pas "âme qui vive", vraiment ? Et l'eau, le ciel, la terre, les arbres ?
Je pense aussi à ces prises de vue nocturnes du beau film "Urga" de Mikhaïl Mikhalkov : au fil des méandres d'un fleuve enchanteur de Mongolie...
FRIEDRICH-MELANCOLIA...
C'est vrai, c'est vrai ! Caspar David FRIEDRICH a peint en 1822 "L'arbre aux corbeaux" ("Der Kränenbaum") puis "La mer de glaces" ("Das Eismeer") en 1923-24 avec sa tragédie du navire emprisonné dans la banquise au second plan...
Et que dire ? ... C'est encore beau !
(un jeu de mots dans le contexte se cache d'ailleurs sous les blocs de glace... )
Caspar David Friedrich / Rügen
Falaise de craie dans l'île de Rügen
(Caspar David FRIEDRICH, 1818)
L'oeil de la Mer Baltique - central - est là et nous hypnotise...
On peut se reconnaître indifféremment dans la jeune femme en rouge, le jeune homme au chapeau sombre ou ce vieil homme troublé par le Grand Vide ou cherchant quelque chose à terre (ses lorgnons simplement cachés dans l'herbe ?) : il semble d'ailleurs qu'on veuille l'aider...
On ne ressent pas dans cette toile la mélancolie et l'angoisse qu'il y a généralement chez Friedrich.
Sans doute suis-je un grand mélancolique caché ?
Jusqu'aux fameux "Les âges de la vie" ("Die Lebenstufen") terminaux, peints en 1835 juste avant l'apoplexie de l'artiste, je ne vois que vision féérique d'un "Au-delà dans les beautés de la Nature" dans toute l'oeuvre de C.D. Friedrich...
Songe, Muriel, encore (songe, c'est le mot...)à sa "Frau am Fenster" ("Femme à la fenêtre", peint en 1822) ou au fameux "Voyageur au-dessus de la mer de nuages" ("Der Wanderer über dem Nebelsee")de 1817-1818, à ces "Kreidefelsen auf Rügen" féériques ci-dessus...
Même "La grande réserve" ("Das grosse Gehege",1832) ou la "Vue sur Arkona au lever de la lune" ("Blick auf Arkona mit aufgehenem Mond", sépia de 1803) sont des enchantements... des Dark Fairies, comme les nomme Emilie Etienne, illustratrice de "La Belle et la Bête"...
Mon esprit mélancolique et solitaire fait que je retiens surtout le côté "désolation" de son oeuvre comme "L'Arbre aux corbeaux".
Merci pour toutes ces références...