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Regards Féériques, Forêt de Fées & Rêves

26 février 2011

"Le Sanatorium sous la Clepsydre" ou le monde pictural du cinéaste Wojciech Jerzy Has...

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 (Jan Nowicki : Jozef, dans le film La Clepsydre)

Je me souviendrai longtemps du visage accablé de ma pauvre soeur à la sortie du cinéma où je l'avais entraînée voir un film incroyable de Wojciech Jerzy Has... Ma chère frangine préférait évidemment les "films du dimanche soir" - ceux que l'on voyait alors régulièrement à la télévision : les films "normaux" de Claude Lelouch ou bien ceux "avec Romy Schneider" (d'ailleurs, plutôt Le Vieux fusil de Robert Enrico que le terrifiant et baroque L'important c'est d'aimer d'Andrzej Zulawski...). 

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 ( "- Tu peux pas être comme tout l' monde ? " "- Bin non, sinon j' m'ennuierais... " ) 

Sans doute, en mon esprit naïf d'alors, avais-je voulu la sortir un peu de "là"... On pût dire que ce fut joliment réussi !!!

Ah, si l'on pouvait simplement entrer en un monde, jusque-là superbement vierge et original : comme par effraction...

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Il s'agissait donc de ce film merveilleux - merveilleusement déroutant pour tout esprit cartésien - tout comme le fut, un rien plus tôt, l'exceptionnel 2001, a space odyssey de Stanley Kubrick en 1968 : 

La Clepsydre (réalisé en 1973), revu plus de dix fois depuis...

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 Mais essayons seulement d'entrer dans la danse...

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(La procession "hassidique" des commis du magasin du père - La Clepsydre)

Ce film fut pour moi la plus belle introduction qui m'ait été donnée à l'oeuvre extraordinairement poétique, enfantesque, cosmique et baroque d'un "petit prof de dessin de Drohobycz" (en sa région de Galicie - alors polonaise) : ce grand "petit homme" nommé Bruno Schulz, écrivain et artiste d'exception, assassiné à 49 ans par un obscur nazillon sévissant dans sa ville natale en cette année terrible : 1942...

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(Le cabinet des figures de cire dans le bateau sous l'arbre... autant d'étranges "Figuren" - comme disaient les nazis des autres humains qu'il tentaient de déshumaniser avant de les "liquider"... Image inspirée du Traité des Mannequinsde Bruno Schulz... .)

Il faut dire qu'il s'agit d'un récit-rêve... un récit labyrinthique où l'on voit, au fil de lents travellings latéraux,  un jeune homme débarquer d'une sorte de train-fantôme (empli d'humains immobiles et de meubles hétéroclites) pour s'inviter en un sanatorium perdu dans la neige où "survit" son père... comme hors du temps...

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(Jan Nowicki : Jozef, ici avec son alter-ego enfantin Rodolf - La Clepsydre)

Le héros (incarné par l'excellent acteur Jan Nowicki) se perd peu à peu dans ce sanatorium aux souvenirs : les temps flamboyants de son enfance, tout comme ceux du rêve et de l'après-vie, s'emparent bien vite de son histoire... Jozef pense à se coiffer d'un casque flamboyant des sapeurs-pompiers qu'il admirait... s'éprend de la servante Adèle tout en veillant sur son père Jacob- plongé dans une étrange "semi-vie" qui le voit se consumer comme une chandelle, sous la responsabilité du Dr Gotard assisté d'une jeune infirmière lascive...

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(Janina Sokolowska : l'infirmière - La Clepsydre)

De passages secrets que l'on découvre en passant sous de grands lits (où l'on croise des pompiers allongés, se pourléchant de sirop de mûre) jusqu'à renaître en des univers tropicaux luxuriants, puis se trouver plongé en un cabinet de figures de cire qu'héberge un bateau-à-aube, gisant abandonné sous le baobab d'une prairie...

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(Jan Nowicki et Ludwik Benoit : Joseph et le colporteur - La Clepsydre)

De toute cette lente traversée de pénombres enchantées puis des ombres grandissantes surgira ce cauchemar de la Shoah qui engloutit (hélàs !) le poète Schulz, ses Boutiques de Cannelle, sa Rue des Crocodiles, son grand Printemps sans commencement ni fin, ce Treizième mois de l'année... 

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(Tadeusz Kondrat, Jan Nowicki : Jacob et Jozef ici réunis dans la même Geste onirique - La Clepsydre)

Fantaisies nocturnes d'un incroyable cosmos "chagallien" s'agitant sans cesse au-dessus d'une petite ville provinciale... Tous ces grands rêves mythiques nés de notre Enfance...

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(Jan Nowicki : Jozef, le fils - La Clepsydre)

Mouvements d'affection, de tendresse et respect entre un père et son fils. 

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(Tadeusz Kondrat : Jacob, le père - La Clepsydre)

Puissance incroyable de nos songes, du Temps et de la mort, invitées à régner sur nos petites vies : ici sur 125 petites minutes magiques de pure Cinématographie polychrome...

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Imaginez un seul instant l'effroi de ma soeur... J'ai refait un peu plus tard la même expérience (passionnante mais, bien sûr, à très hauts-risques) avec une copine et un copain... J'aurais dû finir par l'appeler : "Le test"...

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(affiche originale de l'artiste Starowieyski créée pour le film de Has, La Clepsydre)

Et Dieu merci, personne à cette époque en France n'avait encore pu découvrir  l'affiche originale - polonaise - de Sanatorium pod Klepsydra (1973)... (rires). Les artistes polonais d'alors (sous la coupe communiste, alors,  mais hors de toute préoccupation commerciale)  n'y allaient décidément pas par quatre chemins... Has n'a - tout au long de sa carrière - jamais fait aucune compromission... S'entêtant - au pris d'un certain isolement - à suivre son chemin personnel, bien loin des canons esthétiques ou thématiques en vigueur (Ceux du réalisme socialiste puis ceux de l'ère Solidarnosc... où s'engouffra avec un rien d'opportunisme le grand artiste et "collègue" Andrjez Wajda) et se dégageant systématiquement de toute "contrainte d'actualité", ce qu'il paya sur le tard - dans les années quatre-vingt... (*) 

(*) ... sans compromis du moins jusqu'en son 14ème et ultime long métrage, Les Tribulations de Balthazar Kober, (1988), co-production européenne "en version originale française"- réunissant une pléiade d'acteurs français qui ressemblent plutôt à de vagues pâtisseries indigestes brutalement immergées dans un tableau de Corot - oeuvre plutôt décevante, que je soupçonne Has d'avoir "subie" plus que vraiment dirigée... mais des circonstances atténuantes doivent lui être accordées : l'artiste voulait simplement, à 60 ans passés, continuer à travailler...

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 (Mieczyslaw Voit : le contrôleur aveugle du train-fantôme - La Clepsydre)

Bref, neuf années de silence suivirent après La Clepsydre, film qui fut particulièrement mal accueilli dans son pays d'origine : de nombreux critiques particulièrement obtus criant à la trahison de l'oeuvre de Schulz... Heureusement, le film créa un choc esthétique sans précédent au festival de Cannes (Prix spécial du Jury)...

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Un autoportrait de Bruno Schulz (1893-1942)

Halo de mystère et labyrinthe de ces maisons miniatures autour du dessinateur-peintre-graveur-poète Bruno Schulz (professeur de dessin dans le civil). L'artiste s'est campé au milieu de sa ville natale de Drohobycz (ex-Galicie autrichienne, aujourd'hui en Ukraine). Autour de lui - au pied de chaque maison de poupée - tous les rêves, les fascinations et odeurs des ruelles de son enfance semblent reprendre vie...

Sklepy Cynamonowe : Boutiques de Cannelle...

*

 " (....) Le Livre... Jadis, au petit matin de mon enfance, à la première aube de ma vie, sa douce lumière éclairait l'horizon. Il reposait glorieux sur le bureau de mon père qui, plongé en lui, frottait en silence, patiemment, d'un doigt huméctéde salive le dos des feuillets jusqu'à ce que le papier aveugle s'embrumât, se brouillât, réveillât le troublant pressentiment. Soudain, le papier tombait en miettes, déoilant un bord ocellé, et mon regard défaillant glissait dans le monde vierge des couleurs divines, dans l'humidité merveilleuse de couleurs limpides. Ô écailles brusquement tombées des yeux, ô invasion de clarté, ô doux printemps, ô père...

Parfois mon père se détachait du Livre et s'éloignait. Je restais seul, alors le vent traversait les pages et les images se levaient.

Et quand je le feuilletais, un frisson parcourait les colonnes du texte, laissant s'échapper d'entre les lettres des vols d'hirondelles et d'alouettes. Une page après l'autre s'envolait ainsi, s'éparpillant, se fondant doucement dans le paysage qu'elles imprégnaient de couleurs. Parfois le Livre dormait et le vent soufflait sur lui doucement comme sur une rose à cent pétales, ouvrant la corolle, ouvrant une à une les paupières, écartant un à un les pétales de velours, aeugles et endormis, qui dans leur noyau cachaient la graine d'azur, la moelle chatoyante, le nid piaillant de colibris. (...) "

Bruno Schulz, Le Livre, première des nouvelles traduite par Thérèse Douchy, extraite du recueil Le sanatorium au croque-mort (Sanatorium pod Klepsydra) Denoël, 1974

*

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Nikolaï (Gustaw Holoubek) et Katarzyna (Hanna Mikuc), dans Une histoire banale

Mais pour Has le solitaire, suivit Une histoire banale (adaptée d'une oeuvre d'Anton Tchekhov) en 1982... Un vieux professeur de médecine en semi-retraite dans une ville provinciale de la Pologne du XIXème siècle finissant... Son épouse "petite bourgeoise au foyer" ne se souciant guère que des convenances... Sa fille condamnée (On le devine... ) à devenir vieille fille hystérique ou mal-mariée... Un milieu pétri de conventions, où suinte un ennui verdâtre et inexprimable... Un sentiment secret et puissant attache le vieil homme à la fille d'un vieil ami décédé... Katarzyna, sa fille adoptive : une actrice hypersensible qui a fini par haïr le milieu des "m'as-tu-vu" théâtreux qu'elle doit cotoyer... doutant sans cesse d'elle-même... à la recherche d'une image masculine et paternelle, sécurisante et valorisante, dans cette "petite ville grisâtre" qu'ils rêvent tous deux de fuir...

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(Gustaw Holoubek : Nikolaï - Une histoire banale)

Mais voici ici l'acteur Gustaw Holoubek - déjà inoubliable en artiste alcoolique dans le premier (et superbe) long métrage de Has, Le noeud coulant réalisé en 1957 ; il incarnera de nombreux personnages des films de Has, dont le docteur Gotard, "maître du temps retardé (et déréglé) de La Clepsydre ; il incarne ici le héros vieilli et dépressif - dont on entend la voix off désabusée et tristement sarcastique dans la première partie d'Une histoire banale ; il semble avoir, sur cette photographie, le visage et la fausse bonhommie du réalisateur français Claude Chabrol (*) ...

(*) Anecdote : ma petite Fée m'a affirmé que dans ce film, l'acteur "ressemblait à DSK !" mais là, je m'insurge... C'est absolument faux !!! Car je suis admiratif du jeu tout en pudeur de cet acteur qui jouait aussi le rôle du médecin dirigeant le sanatorium de "La Clepsydre"... Ah là là... quel conditionnement ! Déjà que gazettes et télés font tout pour nous "préparer" à  un triste affrontement entre l'un de "nos" deux "tas d' fric" nationaux en vogue ("Ycelui-de-droite-bling-bling" ou "Ycelui-de-gauche-FMI" ? Quel suspense... mais regardez bien le montant de leur "petit" salaire... rires) : bref,  "match" prévu pour 2012 (et présumé sans retour) face à une stupide fasciste (pléonasme), sur le petit théâtre rabougri de notre trop vieux pays !

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Il ne se passera évidemment "rien" entre les deux protagonistes, Nikolaï (Gustaw Holoubek) et Katarzyna (Hanna Mikuc)... Un abîme de décennies et de souffrances incommunicables les sépare... Les moments qui les rassemblent sont pourtant telles des nacelles suspendues au-dessus du vide et du fleuve-Temps... L'oeuvre est picturale, inoubliable...

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(Hanna Mikuc : Katarzyna, dans Une histoire banale)

Toute la deuxième partie du film où intervient Katarzyna semble éclairer soudain l'oeuvre, composer un tableau polychrome mouvant, comme une "toile de maître" vivante... (Has termina ses études de peinture avant d'embrasser la carrière de cinéaste). La jeune femme au manteau rouge hésite puis s'immobilise devant les murs blancs de la chambre d'étudiant du vieux professeur... Se sentant abandonnée, désormais sans plus aucun repère "protecteur", elle partira sans même se retourner : cette fin inattendue, poignante par sa simplicité même, vous tire brutalement les larmes des yeux... sous les accents douloureux d'une étrange musique cristalline.

*

Les DVD de toutes les oeuvres cinématographiques de Wojciech Jerzy Has

parmi lesquels les magnifiques...

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Aleksandra Slaska et Gustaw Holoubek : Kuba et sa compagne - Le noeud coulant 

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Gustaw Holoubek et Jan Kreczmar : Kuba et le saxophoniste ivre - Le noeud coulant 

Le noeud coulant (1957)

Récit poignant des vingt-quatre dernières heures - entre alcool, errances, amours et désespoir - d'un artiste...

Oeuvre au même niveau émotionnel et esthétique que Le Voleur de bicyclette de Vittorio de Sica...

Adaptation d'une nouvelle de Marek Llasko 

*

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(Tadeusz Janczar et Maria Wachowiak : Pawel et Lidka, dans Les Adieux)

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 (Maria Wachowiak : Lidka - Les Adieux)

Les adieux (1958)

Superbe histoire d'amour entre deux protagonistes insouciants, séparés par l'ellipse d'une guerre foudroyant la Pologne à la fin de l'été 1939... 

" Pawel est un jeune étudiant qui rejette en bloc son milieu. Il tombe amoureux d’une danseuse nommée Lidka. Puis la Guerre éclate… Quand ils se retrouvent après le conflit, Pawel a connu le camp de concentration à Oswiecim et Lidka s’est marié à un aristocrate opportuniste. Pourtant, ils semblent encore attirés l’un par l’autre… "

(Anaïs Truant, Culturopoing.com, juin 2008)

Adaptation d'un roman de Stanislaw Dygat

*

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 (Zbigniew Cybulski, Joanna Jedryka, Iga Cembrzynska - Le Manuscrit trouvé à Saragosse)

Le manuscrit trouvé à Saragosse (1964)

 Oeuvre fantastique-drôlatique inspirée du "maître-roman" du comte voyageur Jean Potocki

(ici dans sa version intégrale restaurée par Martin Scorcese)

*

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(Irena Orska : Adela, la servante dans La Clepsydre)

La Clepsydre (1973)

" Ce monument fondamental de l'histoire du langage cinématographique est un chef d'oeuvre. "

(Jacques Siclier, Le Monde)

Oeuvre-kaléidoscope ressuscitant le monde poétique étonnant des nouvelles du poète

Bruno Schulz (voir ci-dessus)

*

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(Hanna Mikuc : Katarzyna, dans Une histoire banale)

Une histoire banale (1982)

" Qu’ils soient volés ou plongés au-dedans d’eux-mêmes, les regards semblent les seuls rescapés de la pensée, figures d’élévation entre la beauté, la résistance et la mélancolie.

(Olivier Rossignot, Culturopoing.com, nov. 2009)

Magistrale adaptation d'une oeuvre d'Anton Tchekhov  (voir ci-dessus)

 *

... ainsi que 9 autres titres du grand (et trop méconnu) cinéaste Has 

sont tous disponibles chez l'éditeur de DVD Malavida

(versions originales sous-titrées en français, avec grande qualité d'image des copies présentées) .

*

Et pour en apprendre "encore un peu plus"

sur l'oeuvre du Magicien polonais Wojciech-J. Has,

visitez le site "dédié et consacré au cinéaste"

nous offrant les passionnants travaux d'Anne-Guérin-Castell

(qui, je l'espère, pourra un jour lui consacrer un VRAI gros livre !) :

 http://www.anne-guerin-castell.fr/

*

Quant à l'oeuvre littéraire de Bruno Schulz...

(deux gros recueils de nouvelles, édités en Pologne respectiement en 1934 et 1937, magnifiquement traduits en français : Les Boutiques de Cannelle et Le Sanatorium sous la Clepsydre), elle était jusqu'alors proposée chez Denoël - rééditée et désormais disponible chez Gallimard... Enfin, une inoubliable longue nouvelle poétique du second recueil, Le Printemps, est également disponible en collection "folio 2 euros".

*

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   P.S. et aheum... : au vu vos premières réactions (un peu craintes mais TRES encourageantes, cependant... ), je dois vous rassurer : suis également capable de visionner jusqu'au bout (voire d'apprécier) des oeuvres aussi grandioses et incontournables que... Les Bronzés, Les Bronzés font du ski (mais le III est nul... ), Les Visiteurs (mais les II et III sont nuls... ), Camping (mais le II est nul... ),  Les Ch'tis (tout seuls pour l'instant... ), etc.

   Disons que, nullement "tourmentés", les films de Has nous demandent un petit EFFORT d'acclimatation...

  "Effort" est devenu ce mot terrifiant qui aujourd'hui - Soyons honnêtes ! - nous donne à tous envie de fuir à quatre pattes par la fenêtre... ou en passant sous les lits - tel le héros au casque de sapeur-pompier, téméraire explorateur de sanatoriums sous La Clepsydre de Has... (rires)

   Effort ? Bin... cet article pour essayer de vous faire découvrir les films inconnus de Wojciech Jerzy Has (1925-2000, avec une oeuvre comprenant 14 longs métrages) et les nouvelles de Bruno Schulz (1893-1942 et deux recueils d'histoires magiques) m'a demandé d'y travailler plus de QUATRE HEURES, au final... Recherches iconographiques et retouches comprises (comme à la robe de bal de Cendrillon, jusqu'au graissage de l'essieu de son carosse-citrouille... ) et j' regrette pas !!!

(Dourvac'h)

*

Toutes les (merveilleuses) photographies de cet article

sont extraites du riche fond d'Archives de

Film Polski/ "Wojciech Jerzy Has"

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20 février 2011

Un dessin... / Rysunek...

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... est un miroir...

... jest lustrem ...

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... où nos âmes...

... gdzie nasze dusze ...

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s'assemblent...

montażu ...

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se reflètent...

odzwierciedlone są ...

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s'éveillent...

obudzić ...

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... Belles

... Piękne

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... au bois dormant sous leurs châteaux blancs

... Spanie pod ichbiałe zamki

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sous le souffle frais

w świeży oddech

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du Grand Printemps...

Wiosna Grand ...

*

Merci au Grand Printemps

et à son soleil frais en ce dimanche 20 février matinen Ariège...

... à la traduction en polonais assurée par la barre d'outils Google

- pour notre Amie illustratrice (from Poland) Lavandula

et la musicalité de cette langue magique...

en hommage aux films d'Andrzej Wajda et de Wojciech Jerzy Has -

... ainsi qu'à John William Waterhouse et son Ophelia ...

... et à Aurelia, Barbara, Christiana, Ehaa &Muriel

pour leurs suggestions de titres

au dessin (toujours inachevé) :

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Rose et bleue

Różowym i niebieskim

(Aurelia)

ou

" Là était le bonheur, peut-être... "

(Muriel)

ou

Voyage autour de ma chambre

(Christiana)

*

détails (Więcej)

*

dessin & photographies :

(Dourvac'h)

*

Niedziela, 20 luty 2011

12 février 2011

Waterhouse / Millais : la Maison du Miroir de l'Eau...

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(1) 

Mariana, longuement...

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(2) 

... (se) réfléchit...

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(3)

... s'étire lentement face au couchant...

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(4)

La Dame de Shalott vient de sortir sur la rivière...

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(5)

Ophelia, qui...

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(6)

... s'y noya... Pourquoi ?

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(7)

" Interrogeons notre boule de cristal... "

*

And down the river's dim expanse

Like some bold seer in a trance,
Seeing all his own mischance —
With glassy countenance
Did she look to Camelot.

And at the closing of the day
She loosed the chain, and down she lay ;
The broad stream bore her far away,
The Lady of Shalott.

Et dans les eaux sombres de la rivière
Tel un prophète téméraire en transe,
Réalisant toute son infortune —
C'est avec une figure terne
Qu'elle regarda Camelot.

Et lorsque le jour déclina,
Desserrant la chaîne, elle s'allongeait ;
Le courant au loin l'emportait,
La Dame de Shalott…

(part IV of Lord Alfred Tennyson 's poem, 1833-1842)

*

D'après la légende, il était interdit à la Dame de Shalott de regarder directement la réalité du monde extérieur ; elle était condamnée à voir le monde à travers un miroir et se mit à tisser ce qu'elle voyait sur une tapisserie. Son désespoir allait grandissant lorsqu'elle observait des couples amoureux enlacés au loin. Nuit et jour, elle se languissait d'un retour à la normalité. Un jour, apercevant le reflet de Lancelot passer devant le miroir, la Dame se mit à l'épier directement, ce qui déclencha une malédiction. Durant la tempête automnale qui se produisit alors, la Dame embarqua alors dans un bateau sur la proue duquel elle inscrivit « La Dame de Shalott ». Elle chantait sa complainte en naviguant vers Camelot et une mort certaine. Son corps gelé fut retrouvé peu après par les dames et chevaliers de Camelot dont Lancelot, qui prièrent ensuite pour le repos de son âme. La tapisserie qu'elle avait tissée durant toute sa captivité recouvrait un des bords de son embarcation.

(Légende arthurienne - source : Wikipedia)

*

(1) & (2)

John William Waterhouse

Mariana in the South

(huile sur toile, 114 x 74 cm - 1897)

*

(3)

John Everett Millais

Mariana

(huile sur toile, 59,7 x 49,5 cm - 1851)

*

(4)

John William Waterhouse

The Lady of Shalott

(huile sur toile, 153 x 200 cm, 1888)

*

(5)

John William Waterhouse

Ophelia

(huile sur toile, 1889)

*

(6)

John Everett Millais

Ophelia

(huile sur toile, 76 x 112 cm - 1852)

*

(7)

John William Waterhouse

The Crystal Ball

(huile sur toile, 1902)

*

5 février 2011

Coragem Irmon...

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Coragem Irmon

Courage, frère

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Ca bô desanima ô fidjo

Ne désespère pas, fils

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Força de vontade

La force de la volonté

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E tao grande

Est si grande

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Pa mode alguem qui dispreza 'bo

Ne te laisse pas abattre

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Tudo ta fazê parte

Parce qu'on t'a méprisé

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Di nôs vida

Notre vie est ainsi faite

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Si hoje

Si aujourd'hui

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Causa de casode e' riqueza

L'on ne se marie que pour chercher richesse

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Nôs sentimento ja caba

C'en est fini du sentiment

CIMG9933

Tonte gente

Tant de gens

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Envolvido ness riqueza

Vivent préoccupés par cette richesse

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Qu' sês coraçao ta sofrê...

Qu'ils en ont le coeur meurtri...

*

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paroles : Toi Vieira

chant : Cesaria Evora

(copyright : Lusafrica, album CD Cabo Verde, 1997)

*

photographies : Dourvac'h

la Isla de El Hierro (Canarias), fin octobre 2009

*

... et dès maintenant

découvrez TOUTES nos réponses

à vos charmants 20 messages

sous l'article-dessin précédent :

Quand le (Sur)naturel féminin revient au galop... !

*

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Avec une pensée (sauvage)

pour le grand courage et l'esprit de Paix

de nos soeurs et frères (de coeur et d'âme)

... de Tunisie, d'Egypte et d'ailleurs...

30 janvier 2011

Quand le (Sur)naturel féminin revient au galop...

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Premiers pas et détails d'un dessin largement inachevé à ce jour...

Rose et bleue

ou

" Là était le bonheur, peut-être... "

*

Merci à nos Amies Muriel, Christiana et Aurélia,

pour vos trois suggestions de titres !

*

... et nos 30 réponses à vos 30 belles réactions

vous attendent sous l'article précédent !!!

*

Dourvac'h

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22 janvier 2011

Introspection ou Le portrait intérieur

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Esquisser au moins quelque chose...

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... voir venir à soi trois belles questions :

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" D'où venons-nous ? ...

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... Que sommes-nous ? ...

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... Où allons-nous ? " (*)

(*) Titre du fameux tableau panoramique (1897) de Paul Gauguin

*

(Dourvac'h's)

Introspection ou Le portrait intérieur

crayons de couleurs Polychromos sur papier Ingres 65 x 50 cm, 19, 20 et 21 janvier 2011

*

Autoportrait intérieur ? Son premier nom fut : "Déterminée"...

Une ennième vision d'âme...

*

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" Vous avez découvert un espace intermédiaire, où les affaires de la vie ne font pas intrusion ; où l'instant fugitif daigne s'attarder pour devenir un vrai présent ; un lieu où le Temps, lorsqu'il se croit à l'abri des regards, s'assied au bord du chemin pour reprendre son souffle. Ah, s'il pouvait s'endormir, et permettre aux mortels de continuer à vivre sans plus vieillir ! "

Nathaniel HAWTHORNE, L'Esprit hanté, "Contes et récits"

(traduction de Muriel Zagha, page 44 de l'édition de poche "Babel")

Illustration : ... restée longtemps à regarder le feu mourir...

(crayons de couleurs - détail de la minuscule esquisse du dessin ultérieur)

*

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Aussi, découvrez nos 23 réponses personnelles à Votre gentillesse ...

sous l'article du 6 janvier :

The (very) little fairy-world of Dourvac'h / part three...

*

... puis nos 8 réponses sous le grand dessin naïf d'une âme tsigane

sous l'article du 13 janvier:

... restée longtemps à regarder le feu mourir...

*

... et toujours PanGea (en son XIXème épisode, trop peu lu) ci-dessous...

... et encore PanGea (le XXème épisode) pour samedi 5 février !!!

*

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... et à l'attention particulière de SeL et de nos Amies & Amis,

après le célèbre Autoportrait à l'oreille coupée

(Vincent Van Gogh, Arles, 1889)

voici celui de La femme (ou l'âme) aux oreilles remodelées

(Dourvac'h, Viviès, 2011) ...

( ... ENFIN dans sa version originelle non sous-titrée définitive !)

16 janvier 2011

PanGea /XIX

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XIX

  « Où allons-nous, où allons-nous ? »

   A nouveau la chaleur ; tous à la recherche d’une ombre.

  Shou-Lîen a rejoint les autres sur la charrette ; le petit frère blessé somnole près du corps de sa mère ; les petites geignent. La mule se traîne.

*

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  Xi-Jîn préfère marcher. Une mouche vient se poser sur ses lèvres ; sa main est venue la chasser… Son autre main serre fort, très fort, deux des longs doigts de Chân : comme un anneau qui les emprisonne.

  Elle ne lâchera pas la main de Chân.

  Parfois, du haut de la charrette, les petits yeux noirs de Shou-Lîen viennent chercher ses yeux à elle, puis s’en retournent, très vite  tels des hirondelles ; quittent à nouveau le charroi ; font le tour du visage et du regard de Chân ; reviennent à la roue et aux planches qui tressautent… aux sandales bleues de la mère (Pour s’occuper, elle joue à les dénouer puis les renouer… ).

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   Xi-Jîn pense : pour Shou-Lîen, leur mère est devenue poupée à habiller.

     La charrette grince.

    Sœur, tu t’es réfugiée là-haut pour nous regarder… ou bien est-ce Chân qui te fait peur ?

   Xi-Jîn s’étonne que la belle main de Chân n’attire plus autant sa sœur… Sans doute la trouve-t-elle dure et inhumaine : une main de pierre, d’un dieu étrange.

*

   Elle, ne trouve cette main ni dure ni inhumaine. Seulement tendre.

  Chân garde les yeux baissés sur le chemin comme ébloui de poussière blanche. Jamais il ne tourne les yeux vers elle.

  Peut-être s’est-il absenté ?

  Peut-être l’a-t-il oubliée ?

  Elle croit qu’elle n’est pour lui qu’une petite fille qui s’accroche à lui.

*

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  « Où va-t-on, Chân ? »

  Elle lui a parlé depuis l’intérieur d’elle.

  Maintenant Chân se tourne vers elle.

  Elle attend…

  «  Tu m’as entendue ? »

  Il fait signe que oui.

  Elle sait qu'elle a rejoint son monde.

*

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  « Tu pleures ? »

  Non, c’est la poussière… le chemin… Je suis fatiguée.

Un silence. Et si la petite fenêtre de son monde se refermait pour elle ? Elle doit vite reparler, très vite…

Où va-t-on ?

Où a dit l’homme... Il est parfois devant nous, parfois au-dessus de nous. A mesure que nous avançons, il me montre le chemin à suivre…

–  Toi, tu le vois ?

Comment le verrais-je ? Il laisse des traces à l’intérieur de moi…

Tu n’as pas envie de le voir ?

Non.

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… et les traces ?

Les traces…

Il rit.

Il y a encore quelque chose que tu ne sais pas… C’est lui qui a décidé cela…

Quoi ?

Ça, par exemple : tu ne dois pas me lâcher la main… sinon, je perdrais la piste !

Certainement qu’il l’a vue rougir…

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Tiens ! Tu vois cette pierre énorme ? Elle ressemble à un lièvre… avec ses grandes oreilles collées contre lui en train de fuir… Et ce lézard qui vient de se couler dans l’herbe, juste à tes pieds ?… Et ce petit nuage qui vient de s’arrêter face au vieux vallon gris ?

Dis-lui d’arrêter… C’est loin, c'est si loin…

Il ne répond pas ; ralentit son pas puis se tourne vers elle. Il y a cette douceur dans l’air ; ce bruissement de mots en vrai glissant des lèvres de Chân :

«  Xi-Jîn, tu dois me lâcher la main. Maintenant, l’homme nous dit d’arrêter… »

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( ... à suivre... )

*

... et le livre, PanGea ? Il existera - Inch' Allâh ! - fin mai 2011...

(20 d'entre Vous l'ont déjà retenu... Grand Merci !)

*

Texte & photographies :

Dourvac'h

(1), (2), (3), 4), (5) & (6) : Isla de El Hierro (Canarias), octobre 2009

(7) : Massif du Plantaurel (Ariège), hiver 2009-2010

(8) : Monts d'Olmes (Ariège), été 2009

13 janvier 2011

" ... restée longtemps à regarder le feu mourir... "

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Comme surgies de l'ombre,

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toutes nos réponses Vous attendent...

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... après vos mots offerts,

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juste sous l'article précédent...

*

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Dourvac'h

*

" ... restée longtemps à regarder le feu mourir... "

- détails et ensemble -

(dessin crayons de couleurs Polychromos, 45 x 65 cm, 16 janvier 2011)

6 janvier 2011

The (very) little fairy-world of Dourvac'h /Part three

( ... suite d'un long dialogue élaboré en août 2010 : Loetitia Pillault - Dourvac'h )

... et pour lire ou relire "Part one" ? Voir notre article du 25 septembre 2010 ...

... and "Part two" ?  Voir notre article du 17 octobre 2010 ...

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Mélancolie ou âme qui rêve (dessin, 2009)

- Et la mélancolie... amie ou ennemie ?

Tu as la réponse dans mes dessins... la mélancolie est plutôt "amie" (ou disons : "alliée") puisqu'elle donne accès à la rêverie... et ouvre entièrement le monde... les yeux de mes fillettes et mes femmes sont ainsi pleins de "rêves d'ailleurs"... On peut interpréter que ces personnages – masculins ou féminins – immobilisés dans leurs rêves sont à coup sûr l'expression de mon âme... j'ai toujours eu en moi cette sensibilité dite « féminine », je l’accepte et l’assume… et je me rassure en me disant que je ne dois pas être un "cas" isolé... beaucoup de personnalités dites "artistes" sont sans doute faites de cette même «pâte» d’âme... il y a ainsi le petit garçon rêvant (gravement) sur son camion en bois peint... les fillettes jouent à la poupée mais semblent bien «absentes»... les femmes y sont des fées qui regardent leur miroir ou s'élèvent dans le ciel, souriantes, à la fois confiantes et épanouies... je n'ai pas envie d'interpréter... disons que sur le dessin, comme dans la vie, j'aime voir l'épanouissement sur le visage de l'aimée... l'amour physique est le plus haut point du partage possible... le visage de la femme aimée y devient fleur...

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« Avec toi, je m’étais envolée… » (détail dessin, 2010) 

- Tes personnages ont presque tous en commun un désir d’échapper à une réalité sombre par la force de leur imaginaire… peux-tu nous en parler ?

Je dirais que c'est leur droit... D'ailleurs, ils ne se privent pas de l'exercer !!! La force de l’imaginaire explique sans doute la naissance et le maintien de la vie sur Terre… Tout ce qui «n’imagine» pas est condamné par avance…

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La petite fille de la clairière (détail dessin, 2010)

- Il y a toujours des contrastes dans tes récits. Entre l’innocence et les idéaux, opposés à une certaine gravité, un côté sombre… Sais-tu que c’est là toute la force de tes récits et dessins ?

Merci, mais je ne sais quoi te répondre d'autre que ce "merci"... Notre existence est entièrement tissée dans ces "forts contrastes"... J'ai l'impression que l'on ressent beaucoup plus l'ivresse de vivre en s'évertuant à respecter - y compris en Autrui - ces "forts contrastes"... Mille occasions que nous offre notre quotidien, au fil des jours...

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Eryngium maritimum L. et Pins maritimes à La Franqui (Aude), 2010

- Parle-nous de l’influence de la Nature dans tes œuvres écrites...

La Nature est partout, heureusement... partout autour de nous... même malmenée... piétinée... "consommée"... je ne comprends pas que les humains restent à vivre dans les villes, c'est-à-dire si loin de cette source d'harmonie, cette source "sûre" de beauté : les collines, les montagnes, les forêts... Mais sans doute y sont-ils obligés... Il se trouve que la simple vision du monde naturel est quelque chose qui nous apaise...

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Comment pourrais-je t'oublier ? (première étape dessin, 2010)

- Que dire de l'ancrage amical dans la réalité sombre de tes personnages ?

Dire que tu en parlerais sûrement mieux que moi... Mes personnages sont plongés dans la pénombre... mais cette pénombre, c'est notre vie quotidienne... la pénombre "prend la lumière", peu à peu, au fil du récit... leur monde s'éclaire... les deux derniers chapitres d' Au Jardin après la scène terrible de la noyade de Carine... où l'on vit comme de l'intérieur l'étouffement de ma petite héroïne, ses deux poumons avec leurs milliers de petites alvéoles pulmonaires qui se remplissent d'eau... inexorablement… La conscience de vivre dans «les Limbes» qui suit ce moment pénible crée une respiration, comme un « Ouf ! » de soulagement… Les Limbes sont un monde de lumière où sans aucun ressentiment particulier (le ressentiment appartient au seul monde adulte… ) Carine retrouvera «naturellement» Damien, son jeune "noyeur" (et noyé) par maladresse... Les parents de Carine avaient bien «raison» de prévenir la gamine : ce Damien Stacci est non pas un «voyou» mais un terrible inconscient face auquel des parents sensés auraient bien tort de laisser leur fils ou leur fille passer un seul après-midi en compagnie de ce spécialiste en idées baroques…très «meneur», par ailleurs (on dirait «enfant leader» mais la langue des psychologues se préoccupe peu de poésie, c'est dommage…)

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Porte des mauvais rêves (esquisse, 2007)

- On sent cette force de la terre (accompagnée de tes si belles photos) et en même temps le côté impalpable des rêveries, de l’esprit imaginatif de tes personnages … je pense à cet arbre dans Au Jardin , lien entre la terre-réalité et le ciel-rêves… Pourquoi est-ce important pour toi de jouer sur ces 2 plans ? presque 2 mondes ?

Au Jardin est né d’une idée : une fête d’enfants qui tourne à l’étrange... il n’est pas banal que les deux personnages principaux soient transformés en crapauds dès la première page d’une histoire, ne s’en ressentent pas si mal et redeviennent dès la seconde page bien humains (là aussi contre leur gré)…se découvrant nus comme « Adam et Eve » enfantins, le rouge aux joues… « à l’ombre des piquets de tomates »… L’enfance est le Jardin d’Eden de nos rêves… Nous allons déchoir ensuite… Je ne me souviens pas précisément de l’arbre dont tu parles : sans doute le Grand Arbre au sommet duquel monte Le Petit Poucet de Charles Perrault : il y a l’arbre-refuge de Chris et Val, ces Tristan et Yseult adolescents de L’été et les Ombres. Ils acceptent d’en redescendre pour des raisons bien banales, contrairement au Baron Perché, ce héros pas si misanthrope – simplement prudent ? – d’Italo Calvino… Il y a dans PanGea le même "Grand Arbre" : «arbre aux rêves», séquoia ou mélèze géant, que Chân considère justement à l'égal d'un Dieu... et qui va se matérialiser puis disparaître devant la bouche d’une caverne qui fait face au vide… Les deux mondes sont juxtaposés en permanence… nous passons sans cesse de l’un à l’autre… Qui nous prouvera la «réalité» exclusive d’un seul de ces deux mondes ? … On a le droit de partager entièrement la perception de Gérard Labrunie «De Nerval» dans Aurelia : « Le rêve est une seconde vie. »… la vie des personnages de «nos» livres (écrits ou lus), aussi…

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Vue sur les étangs de Bassiès (Ariège) depuis le refuge, juillet 2010

- Dans ton œuvre en cours, PanGea, on ressent très fortement les sensations physiques de tes personnages, est-ce une façon de nous faire ressentir ces émotions ? De vivre en même temps que ces personnages... ?

Exactement… et peut-être cette démarche (bien involontaire) est-elle «narcissique» ? … Je me souviens de cette critique à laquelle j'ai été confronté, un jour, à propos de mes dessins et d'un personnage que je faisais intervenir et donc s'exprimer sur mon site...

Effectivement, pour que mon personnage vive, rêve, marche, sente, aime, etc., il faut que je parvienne à m’incarner en lui… ressentir et penser comme lui ou elle… humain (homme ou femme... vieillards, adultes ou enfants), animal (un chien, une chouette, une fourmi... ), végétal (un arbre, le plus souvent...), minéral même !!! (J'ai même voulu incarner un jour la surface terrestre qui était fatiguée des pieds humains qui la piétinaient sans cesse, en long et en large...) C’est ainsi que l’on finit par s’incarner (successivement) dans absolument TOUS les personnages d’une histoires : ces personnes à qui l’on a «prêté vie»… Et j’avoue que j’en ai marre – parfois - d’être «seulement» moi-même… Sans doute cela arrive à PLEIN de gens qui peignent, dessinent, sculptent, façonnent, écrivent… Bref, voici ma «base motivationnelle»...

( ... à suivre... )

*

( "Part four" en début février 2011, pour ne point vous lasser... )

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Peintre au miroir de l'âme (détail dessin, 2010)

dessins et photos : Dourvac'h

30 décembre 2010

Trois poèmes de Mririda N'Aït Attik...

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Le village d'Ighrine, en Aît-bou-Guemez, au lever du jour - photographie : Patrick Flament

*

Partageant légitimement amour et fascination

pour l'incroyable (et âpre) magie

de "leur" Terre marocaine,

nos Amis

Tigwenn & Too banal

se sont un jour coalisés

pour dénicher et (m')offrir ce merveilleux présent...

*

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La prière à l'approche de la nuit et l'invitation au thé - photographie : Patrick Flament

Il s'agit d'un recueil de 102 poèmes et chants de Mririda N'Aït Attik

qu'elle a fait naître dans le Haut Atlas, en sa belle langue Tachelhit

(langue berbère du "Pays des Icheulyen") :

poésie traduite par René Euloge qui connut la poétesse...

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Mririda N'Aït Attik ici en 1940

(Mririda signifie "Rainette")

*

Mririda N'Aït Attik,

poétesse autodidacte, a vécu dans la haute-vallée de la Tassaout

(prenant sa source à plus de 3.000 mètres, au nord de l'Ighil Mgoun - 4.076 m)

et exprimé dans ses chants poignants

toute la mélancolie de sa propre existence

et la beauté de cette haute Terre

où le Destin a choisi de faire vivre son peuple...

*

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Petite fille d'Aït Ali-n-Ito - photographie : Patrick Flament

Voici, choisis pour Vous, trois parmi ces cent deux joyaux,

avec sept des extraordinaires photographies de

Patrick Flament

*

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Mririda N'Aït Attik

Les Chants de la Tassaout,

(Edition Belvisi, BP 8044 - CASABLANCA

1986, 2ème édition : 1992 - prix : DH 350,00)

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L'oued Aït-bou-Guemez à Ighrine - photographie : Patrick Flament

C'est toujours ainsi en ce bas-monde...

*

Il y en a toujours un au-dessus,

Il y en a toujours un en-dessous

Et c'est toujours ainsi en ce bas-monde

En haut, la fortune. En bas, le déshérité.

En bas le faible. En haut, la force, la force...

Et c'est toujours ainsi en ce bas-monde...

Le mortier est fait pour recevoir le pilon

Comme l'enclume est faite pour les coups de marteau.

La meule dormante subit la meule tournante.

Le mulet ploie toute sa vie sous le bât.

La terrasse est bien lourde à la poutre qui la soutient.

Et le bon plaisir du Cadi pèse lourd lui aussi...

De grâce, n'allez pas lui chanter ma chanson !

Bonnes gens, n'ai-je rien oublié ?

Et la femme qui est toujours sans défense !

La femme ! La femme qui est toujours dessous...

*

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Fileuse de laine de Msemrir - photographie : Patrick Flament

Mélopée de la fileuse

*

Tourne, tourne mon fuseau,

Mon fuseau de bois fin et poli,

Tourne de plus en plus vite,

Si vite que tu échapperas à mes yeux...

Tourne ! tu n'auras pas à ralentir

Car mes doigts agiles te nourriront

Au gré de ton tourbillon

Et ne me demanderont pas grâce...

Tourne, tourne, mon long fuseau !

Enroule le blanc fil soyeux

La douce laine qui excelle pour la trame...

Tourne, tourne, mon petit fuseau !

Enroule le blanc fil solide,

La rude laine qui réclame la chaîne...

Blanche toison, enroule-toi

Pour le bien des gens de la maison !

Ne vous brisez pas, longs fils blancs,

Ni maintenant ni plus tard sur l'ensouple

Quand ma fille passera trois fois sous le métier...

File, file plus vite entre mes doigts,

Blanche laine qui alourdit mon fuseau !

Pour la maisonnée, y a-t-il bien plus précieux

Que la laine et le grain, que le grain et la laine ?

Ô Laine blanche, grise ou noire, que ta bénédiction soit sur nous

Avec le secours du Dieu clément et miséricordieux !

*

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Jeunes filles au matin, vallée de la Tassaout - photographie : Patrick Flament

Dieu n'a pas fait de place à la rose

*

... Ma soeur, étrangère au pays, ne t'étonne pas,

Ne t'étonne pas de mon ignorance :

Mes yeux n'ont jamais vu ni rose ni orange...

On dit qu'il y a, en bas, au bon pays

Où gens, bêtes et plantes n'ont jamais froid.

Ma soeur étrangère venue de la plaine

Ne ris pas d'une fille de la montagne

Vêtue de laine grossière et allant pieds nus.

Dieu n'a pas fait de place à la rose,

Dieu n'a pas fait de place à l'orange

Dans nos champs et nos pâturages...

Jamais je n'ai quitté mon village et ses noyers

Je ne connais que l'arbouse et les rouges cenelles

Et l'humble touffe de basilic vert

Qui éloigne de moi les moustiques

Lorsque je m'endors sur la terrasse

Quand sont trop chaudes les nuits d'été...

*

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Bergère d'Imi-n-Oulaoun, sur le versant sud du Mgoun - photographie : Patrick Flament

*

... et je "nous" souhaite à tous une nouvelle année

1.000 fois moins résignée que la précédente !

( Indignez-vous ! comme nous conseille Stéphane Hessel...

et puis que revive, dès 2012, TOUT le programme du C.N.R. !!! )

*

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( ... voir aussi notre p'tit message de 

Remerciements tziganes sous cet article... )

*

... et 1.001 fois Choukrâne ! à Vous,

chers Amis Thami & Tigwenn !!! ...

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